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Les textes de Jean-Pierre D.

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Lettre d’amour à mon petit-déjeuner

Mon café chéri, mon petit noir adoré,

Mon expresso, viens que je te tienne bien serré.
De si bon matin, tu es tout chaud, tu sens si bon.
Je t’aime comme tu es : fort, corsé, long en bouche.

Tu es loin, environ à deux mètres sur le plan de travail et il faudrait que je me lève de table… Mais tu le sais, sans toi, sans t’avoir dégusté, je n’ai aucune énergie. C’est toi qui recharges mes batteries chaque matin.
Ce n’est qu’en avalant ton jus chaud et savoureux que mes papilles se réveillent et intiment à mon corps l’ordre de renaître enfin…

Oh ! le coquin, arrête de me chatouiller, ou alors pas seulement les narines…

Je te l’ai déjà dit mais je t’assure que tu n’as aucune raison d’être jaloux du miel, même de châtaignier : toujours collant, dégoulinant, renversant la tartine forcément du mauvais côté.
Il veut être tout miel avec moi, mais ça ne marche pas.

Et le pain, ce vieux rassis, qui se veut tout blanc, tout moelleux… Je ne supporte plus cette vieille croûte.  Il veut être l’ami, mais je ne mange pas de ce pain-là.

Kawa, mon petit kawa, tu sais que je vais te retrouver ce midi, sur la terrasse. Je te chercherai du regard : tu seras sur une colline kényane ou dans un vallon du Costa-Rica. Et, magie de l’amour, tout près de moi aussi.

Et ce soir, tu seras encore là et je t’appellerai par ton petit nom – DK – pour notre dernier tête-à-tête de la journée.

 

Lettre de rupture

C’est TER-MI-NÉ !
FINI ! Pas de retour en arrière possible. Trop c’est trop !

Tu le sais… pardon dorénavant je ne m’adresserai plus à toi que par un VOUS bien mérité. Car après tout, c’est VOUS qui l’avez cherchée, cette rupture !
Donc, comme VOUS le savez, notre relation est dans l’impasse la plus noire : vous n’aimez pas le café !

Oh ! arrêtez de pleurer. Cela ne fait qu’ajouter une raison de plus à cette séparation inéluctable que j’ai pourtant tout fait pour éviter.

Non, je n’ai rencontré personne… Il n’y a bien que vous pour avoir une idée pareille. Quand en aurais-je eu le temps ? Vous étiez toujours sur mon dos, n’est-ce-pas…

Mais arrêtez donc de pleurer car je le sais bien, vous lisez cette lettre en pleurant. C’est insupportable à la fin ! Agaçant ! Et vous n’arriverez pas à me lire jusqu’au bout, c’est lamentable. Je me fends d’une lettre, pour adoucir un peu la chose, et Mademoiselle pleure !

Tiens, jamais tu n’as pleuré, pardon jamais VOUS n’avez pleuré au cours de ces deux… jours que nous avons passés ensemble. Deux jours avec vous… où avais-je la tête ? Deux jours entiers partagés, plus trois nuits…
Et vous rêviez déjà à toute une vie, je suppose… !?

Non, nous ne reprendrons pas l’avion ensemble. Je sais que vous vous dîtes que peut-être… un taxi pour l’aéroport, un taxi partagé ? Il n’en est pas question, les bus fonctionnent très bien !

Et j’aurai le plaisir de ne pas porter votre valise. D’ailleurs mon kiné me l’avait interdit. Si je l’ai fait à l’aller, c’est par pitié pour vous, par pure gentillesse. Ou plus vraisemblablement parce que je suis bien trop bête. On voit où cela nous a menés !

Ah ! j’allais oublier : pensez à laisser un pourboire à la réception de l’hôtel, je n’ai plus de monnaie.

Et maintenant : TERMINUS !

 

 

Un rendez-vous malgré eux : un couple mal assorti est coincé par un confinement

Vendredi 19 – quinze heures
Ai cru sonner au mauvais endroit. STOP. Gourbi plein de fourmis. STOP. Fourbi. STOP. Pas fourmi. STOP. Individu mal défini. STOP. Surpris mais pas trop. STOP. Attendre avant d’envoyer secours. STOP.

Samedi 20 – midi
Ai mal dormi. STOP. Odeurs de chat. STOP. Envoyer d’urgence litière. STOP. Neuve. STOP. Litières au pluriel. STOP. Neuves aussi. STOP.

Dimanche 21  – heure illisible
Envoyer bougies. STOP. Electricité trop chère pour l’individu. STOP. Toujours mal dégrossi. STOP. Pas dangereux. STOP. Pour l’instant. STOP.

Mardi 23 – cinq heures
Lundi noir. STOP. Comme un lundi. STOP. Bureau Poste en grève. STOP. Télégramme impossible. STOP.
Garett. STOP. Nom de l’individu. STOP. Je répète. STOP. Garett. STOP. Quatre jours pour connaître son nom. STOP.

Mercredi 24 – onze heures
Litières reçues. STOP. Pas le bon modèle. STOP. Merde. STOP. Point d’exclamation. STOP.

Jeudi 25 – minuit moins une
Moins une. STOP. Il était moins une. STOP. Garett saoul. STOP. Trop pressant. STOP. Vraiment entreprenant. STOP

Vendredi 26 – 0h03
Individu Garett. STOP. Au tapis. STOP. A pris pelle à charbon. STOP. En pleine tronche. STOP. Achevé au tisonnier. STOP. Individu neutralisé. STOP. Sang partout. STOP.

Vendredi 26 – 0h15
Litières. STOP. Taille parfaite. STOP. Quantité suffisante pour éponger. STOP. Hémoglobine. STOP.

STOP !

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